Il est rare d’assister à une telle audience. Le tribunal de Saint-Denis voit certes les prévenus accros aux stupéfiants ou à l’alcool, mais rarement aux jeux vidéo. Ce vendredi, Romain N., 24 ans, sera jugé dans le cadre d’une comparution immédiate pour faits de violences avec armes et pour dégradation ou destruction de biens. À première vue, cela ressemble à un accident de la circulation, mais le déclencheur et le contexte sont horrifiants.
Mardi dernier Romain N. a roulé à Saint-Denis. Une moto le dépasse et s’effondre devant lui. Le bruit du deux-roues le dérange, le déstabilise. Il fonce sur la moto, la percute et entraîne le motard sur 50 mètres, selon la victime, qui pend au capot, coincée entre la voiture et la moto. Le conducteur s’arrête et court vers le conducteur puis lui donne un coup de pied. Il va même jusqu’à enlever son casque pour arriver à son visage. C’est l’intervention de témoins qui met fin à l’agression. La police arrive et apprend le contexte et place le conducteur en garde à vue.
« Je peux voir dans ses yeux qu’il veut m’attaquer »
Le pilote, qui essayait discrètement une moto avec l’intention de l’acheter, est légèrement blessé mais fortement ébranlé. Il obtient un ITT de 5 jours. « Je peux voir dans ses yeux qu’il veut m’attaquer s’il sort de sa voiture », a témoigné la victime lors de son interrogatoire, mais n’était pas présente à l’audience.
A la barre, le prévenu reconnaît les faits, mais tempère l’action de traîner le motard. Il dit qu’il ne se souvient pas que cela pourrait être vrai : « Tout est vrai. Le bruit du moteur m’a rendu agité, il a dû s’arrêter ». De plus, sa mère dira aux chercheurs qu’il vit en lui-même, qu’il est agressif et qu’il se met même en colère lorsqu’elle lui apporte de la nourriture, s’il daigne manger. Qu’il est en échec scolaire.
Il est détenu dans l’attente de l’audience et sera soumis à une expertise psychiatrique à la demande de la défense. Le spécialiste constate une crise de type dissociation agressive, probablement due aux jeux vidéo, tout en étant toujours jugé sur ses mérites en termes d’agressivité. Il conclut qu’au moment des faits, le suspect manquait de jugement. Interrogé, l’accusé a confirmé son addiction au président : « C’est ma passion et c’est devenu une addiction. Je joue depuis que j’ai 5 ans, mais je ne suis pas sorti depuis un an, je ne fais rien. plus, je joue ». Lorsqu’on lui demande, il dit qu’il joue à « Fortnite » entre autres.
« Est-ce que tu réalises que tu aurais pu le tuer ?
La mère de Romain N. assiste à l’audience et est en larmes. Un critique le note et interpelle l’accusé : « Tu es adulte depuis 6 ans et tu ne fais rien. As-tu vu le visage de ta mère derrière toi ? Ta famille te dit depuis 6 ans que tu t’es perdu de vue avec la réalité Que penses-tu aujourd’hui ? Est-ce que tu te rends compte que tu aurais pu le tuer ? ». Romain N. reste au sol à la barre et balbutie : « Oui.. J’ai pris conscience de mon addiction en prison quand le psychiatre est venu m’interroger. J’ai compris que j’avais un problème ».
« C’est un cas atypique, on ne voit pas très souvent cette addiction », précise le procureur avant d’enchérir : « Il est obsédé par les jeux vidéo et cache complètement tout le reste. Ce sont des faits extrêmement graves. Il bat et traîne délibérément le motard lui sur 50 mètres alors qu’il est coincé entre la moto et la voiture, il en sort et le frappe à de nombreuses reprises en tentant d’enlever son casque, ce qu’il réussit finalement. Cet excès de colère mérite une explication que nous n’avons pas aujourd’hui. Je vous demande une peine de 2 ans de prison avec probation probation avec devoir de vigilance je ne demande pas de partie ou de détention permanente car au contraire je pense qu’il devrait être dehors et sortir pour renouer des liens sociaux vous demander d’être sa licence pour un période d’un an ».
« C’est bien un dossier où la fiction rencontre la réalité »
« C’est bien un dossier où fiction et réalité se rejoignent », répond la défense du prévenu. « Cette addiction est très connue et répandue aux États-Unis. Il a pris conscience de choses en garde à vue et en détention. Il sait qu’il doit se soigner. Il reconnaît les faits sans pouvoir les expliquer. prison ne ferait qu’aggraver son état. Il faut qu’il réapprenne à vivre et à se soigner, il a compris des choses », plaide la robe noire.
Le tribunal condamnera Romain N.a à 2 ans de prison, entièrement assortis d’une période de mise à l’épreuve renforcée. Il a un devoir de vigilance, de travail et de permis et a été suspendu pour 1 an.