Corentin, pilote du Nomade des mers : « Avec la basse technologie, notre mode de vie peut être meilleur » [Vidéo]

Ils ont parcouru le monde à la recherche de technologies durables

Les low-tech, kesaco ?

Nous avons trois critères à définir : utile, pour répondre aux besoins de base ; accessibles, ce qui les différencie des high-tech, car elles sont fabriquées, réparables, affectées localement, sans outils tranchants ; et durable pour la planète et les humains.

En quoi ces techniques peuvent-elles changer notre quotidien ?

Il s’agit avant tout d’apporter moins de complexité et plus d’intimité à notre quotidien. Les effets sont multiples. Sur l’environnement, sur la santé, sur la géopolitique (avec moins de tensions liées au déplacement des biens et matières). C’est une question de logique : pourquoi faire compliqué quand on pourrait faire simple ?

Comment est née l’aventure du Nomade des mers ?

Nous avons créé en 2013 notre association, devenue le Laboratoire des Basses Technologies, à Concarneau (29). L’objectif était de trouver, dans le monde entier, des technologies inventives répondant à nos trois critères. Et puis les tester pour proposer de la documentation, des tutoriels, pour diffuser toutes ces informations en libre accès, gratuitement, pour que chacun puisse les dupliquer. Nomade des mers est le plus grand projet entrepris par l’association.

Vous avez effectué un très long périple…

Nous sommes partis en 2016. Le voyage devait durer trois ans. Six ont continué. Il y a plus de technologies qu’on ne l’imaginait à l’origine. Comme l’ordinateur ou l’internet low tech. Nous nous sommes arrêtés dans 25 pays. Dans les zones pauvres et dans les secteurs très riches et denses. Partout, nous avons trouvé des informations vraiment intéressantes. Le bateau était un laboratoire. A bord du vaisseau, nous avons étudié une cinquantaine de low tech.

Un exemple de low-tech facile à mettre en œuvre ?

Souvent, ces techniques combinent de nombreux domaines et relient les humains à d’autres espèces naturelles. À Singapour, des systèmes de vidéosurveillance riches en sols non cultivés ont été découverts. Là, ils produisent sur les toits. À bord du navire, nous utilisions soit les eaux grises du bateau, soit les eaux usées de cricket (nous avons une petite ferme). Les bactéries les transforment en engrais pour les plantes.

Et pour le recyclage des déchets ?

Mon préféré est le soldat noir vole. Nous avons étudié cela en Malaisie. Leurs larves sont très efficaces dans le compost. Lorsqu’ils sont prêts à se transformer en insectes, ils sortent et tombent dans un seau. 90 % sont utilisés pour l’alimentation animale, en aquaculture par exemple, et 10 % sont élevés pour relancer le cycle de compostage.

Vous avez beaucoup travaillé sur l’énergie aussi…

Nous avons, par exemple, une éolienne fabriquée avec un moteur d’imprimante, trouvée au Sénégal. Ce moteur est un produit de haute technologie, extrêmement robuste, mais peut être utilisé pour de nombreuses utilisations différentes.

Et puis, en Thaïlande, vous avez vécu quatre mois seul sur une plateforme, avec un canard…

Pour ce projet baptisé Biosphère, il s’agissait de réunir une trentaine d’entre elles dans un seul écosystème low-tech, en connectant des expertises très différentes. Nous partons sur un projet Biosphère 2, en Basse Californie, au Mexique. Le but est de faire quelque chose de plus « agréable » que mon radeau. Il s’agit d’imaginer un avenir qui incarne toute cette ingéniosité. Les voies alternatives, entre futur high-tech et rétrograde, sont en déclin. Si nous poussons la recherche sur toutes ces low tech, nous croyons que notre mode de vie peut être meilleur, à grande échelle.

Et vous avez essaimé, en six ans ?

À notre départ, personne n’avait une vision globale de la basse technologie. De nombreux acteurs nous ont suivis et ont lancé leurs propres expérimentations. D’autres laboratoires low-tech ont été créés. Les jeunes partent dans le monde pour découvrir d’autres technologies. Nous avons amorcé la pompe. Ce mouvement s’accompagne de l’occupation de la société. C’est un travail qui ne devrait jamais s’arrêter.

Festival Low Technology, quai d’Aiguillon, à Concarneau (29), du 25 juin au 3 juillet. Programme complet sur site lowtechlab.org/fr/festival-2022/le-festival-kesako

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