La première édition du festival low-tech a démarré samedi 25 juin. L’idée : démocratiser ces technologies sobres qui nécessitent des changements de comportement importants.
Concarneau (Finistère), reportage
Lorsqu’il a voyagé il y a six ans, il n’y avait pas grand monde. A son retour, samedi 25 juin, ils étaient plusieurs centaines, rassemblés sur le quai du port de Concarneau malgré la pluie éparse. Une foule hétéroclite de sexagénaires ambulants, jeunes ingénieurs aux cheveux ébouriffés et bretons coiffés, mocassins aux pieds et veste nouée aux épaules, sont venus fêter le retour du Nomade des mers, fleuron de la « low-tech ».
L’équipage, qui s’est rendu dans vingt-cinq pays à la recherche de ces systèmes à la fois utiles, durables et accessibles – par opposition au « high-tech » – a été accueilli par un déluge d’applaudissements. « Je ne me sens pas arrivé », commente Corentin de Chatelperron, l’aventurier à la tête du projet. J’ai l’impression que c’est le début de quelque chose. »
L’arrivée du catamaran en fanfare a marqué le lancement de la première édition du festival low-tech, qui se déroule jusqu’au dimanche 3 juillet. Le but : faire découvrir la démarche au plus grand nombre, et montrer qu’elle peut structurer la société. « Nous commençons à faire le tour des systèmes qui fonctionnent, explique Quentin Mateus, du Low-Tech Lab, l’association organisatrice de l’événement. »
Des « systèmes malins » à faire soi-même
Sur le plan institutionnel, c’est une réussite. En partenariat avec l’Agence de la transition écologique (Ademe), la région Bretagne et la communauté d’agglomération, Low-Tech Lab annonce qu’il accompagnera prochainement une vingtaine d’organismes dans leur « transition low-tech ». Parmi eux : l’Hôpital de Concarneau, la Mairie, une brasserie, un hôtel, le Muséum National d’Histoire Naturelle… Le Low-tech Lab va (entre autres) tenter d’améliorer la gestion des déchets, de la chaleur, des déplacements et de la nourriture de ces entreprises. « Il y a encore beaucoup de travail à faire, mais la basse technologie a une réelle capacité à se développer et à changer les choses », a déclaré la vice-présidente bretonne Laurence Fortin, qui espère faire de la zone « Laboratoire européen Low ». -La technologie ».
Du côté de la société civile, la mission semble également réussie : les « ruelles du village », où les acteurs du mouvement exposent leurs innovations, sont remplies. L’endroit ressemble à la grotte d’un Geo Trouvetou. Une joyeuse bêtise de 1 600 m2, où l’on trouve des éoliennes « maison » en bois et planches recyclées, des fermes à mouches noires pour accélérer le compostage, des toilettes sèches et des poêles à bois, qui chauffent votre eau sans utiliser de gaz fossile.
La roche bretonne est émise grâce à une « remorque bombe », un wagon équipé d’un haut-parleur et recouvert de panneaux solaires. Quand il fait beau, « on peut faire la fête à l’infini », assure Adrien, de l’association Véloma. Par temps gris, appuyez sur les pédales. Les festivaliers jouent et grimpent avec plaisir sur des vélos vétérans connectés à l’appareil pour l’alimenter en énergie.
Des ateliers de construction ont également été organisés par Konk Ar Lab, le laboratoire local de production collaborative. L’enjeu est de taille : l’idée du « low-tech » n’est pas seulement d’adopter un mode de vie plus sobre et résilient, mais aussi de retrouver la technique. C’est pourquoi les dessins de ces « systèmes malveillants » sont disponibles gratuitement. Le but est de donner à chacun la possibilité d’être plus autonome, « au lieu de vendre un objet ou un service dont on devient accro », explique Quentin Mateus.
« Tout le monde peut le faire »
Lors d’un barnum, une poignée de visiteurs se concentrent le nez penché sur le plan d’une « marmite norvégienne », une boîte dans laquelle on peut placer ses aliments après cuisson pour qu’ils mijotent sans surcoût énergétique. Nolwenn, ingénieur en environnement de 24 ans, est venue avec son frère de 13 ans.
Son visage rempli de taches de rousseur trace soigneusement des lignes de construction sur un morceau d’aluminium récupéré dans une pharmacie. Ce matériau est généralement utilisé pour conserver les médicaments au frais. Il veut faire un isolant parfait pour son pot. Nolwenn contrôle la main de son petit frère pendant qu’elle coupe. « Le faire vous-même crée une relation presque sensuelle entre votre objet et vous-même », dit-elle. Vous avez moins envie de le jeter, et plus envie d’en prendre soin. « Il faut plus de temps pour cuisiner un repas dans un four hollandais. Mais « ce n’est pas si mal, poursuit la jeune femme, si on apprend à réaménager son temps ».
Une bonne partie des visiteurs, comme elle, sont déjà en train de réduire leur empreinte écologique, et cherchent l’inspiration pour devenir plus autonomes énergétiquement. Beaucoup sont bricoleurs ou ont même parcouru les bancs d’une école d’ingénieurs. « Mais n’importe qui peut le faire », insiste Adrien de Véloma. La fibre DIY, c’est comme dessiner. Tout le monde dessine, mais certains arrêtent à l’âge de cinq ans. »
Pour ceux qui sont moins sensibles aux questions environnementales, il peut sembler plus difficile d’agir. Romain et ses amis, la vingtaine, sont tombés par hasard sur le festival sans connaître la notion de low-tech. « Incroyable ! Ils s’extasient, sourcils levés surpris lorsqu’ils voient un jeune homme sortir une fournée de biscuits chauds d’un four solaire. L’odeur de noisette et de caramel emplit les narines. Le jeune homme et ses amis trouvent la démarche « ingénieuse », mais doute juste avant qu’ils ne la mettent en pratique. Juste avant, ils ont visité la « petite maison » économe en énergie conçue par Low-tech Lab. « C’est sympa, mais je ne me vois pas vivre avec des enfants dedans. » se lève vite », raconte Théo, 24 ans, en désignant son landau.
Epargne, activité physique, reconquête des savoirs, création de lien social…
Julie et sa mère, Maryse, s’accordent également sur le fait qu’une société low-tech nécessiterait un « changement de mode de vie ». En visitant Sea Nomad, ils ont appris que les membres d’équipage devaient faire du vélo pendant plus d’une heure pour recharger les batteries de leurs téléphones. « Si on le faisait, on enverrait probablement moins de messages », sourit le quinquagénaire. Il faut vraiment être motivé. Selon elle, le manque de culture technique d’une partie de la population pourrait être un frein : « Vous devriez pouvoir trouver ces articles dans les supermarchés. Tout le monde n’a pas envie d’en faire. »
Mère et fille considèrent toujours l’événement comme « très inspirant » et vont tester le chauffe-eau solaire et le réfrigérateur du désert à la maison. « Ce type de festival peut entraîner un changement de comportement », espère Julie. De toute façon, nous n’avons pas le choix. »
La démarche, poursuit la jeune femme, a aussi de nombreux avantages. Epargne, activité physique, reconquête des connaissances, création de lien social… Pour symboliser cela, la première journée du festival se termine dans la joie, avec un concert animé par des panneaux solaires. La chanteuse Roza, venue de Belgique à vélo, entame une reprise de « Santiano » à la guitare au coucher du soleil. La musique et les cris de joie étouffent bientôt les hurlements des mouettes. La low-tech est aussi de la partie.
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