Serge et Beate Klarsfeld devaient être présents hier, samedi 9 juillet, à la maison d’Izieu, dans l’Ain, à la frontière avec l’Isère, pour présenter officiellement au Mémorial aux enfants juifs exterminés, tous les documents – lettres, photographies, dessins – que le couple, appelés « chasseurs de nazis », a patiemment rassemblé des preuves pour prouver la culpabilité de Klaus Barbie lors de son procès à Lyon en 1987.
Une exposition inaugurée sans les Klarsfeld, retenus à Paris
Le « boucher » lyonnais est jugé pour crimes contre l’humanité et pour la capture et la déportation à Auschwitz, le 6 avril 1944, de 44 enfants juifs d’Izieu et de 7 adultes. Un seul adulte reviendra. Mais le couple a eu un revers de dernière minute et n’a pas pu voyager depuis Paris. Déception donc pour les 80 personnes qui ont réservé leur place pour assister à leur conférence et les entendre raconter l’histoire de ces cartons remplis de documents historiques.
Qu’importe, l’exposition consacrée à l’un des enfants d’Izieu, Georgy, jeune Autrichien né en 1935, est bien visible. Il est visible jusqu’au 30 septembre. Dans la galerie Sabine Zlatin (du nom du directeur de la colonie), sont exposés des photographies, des lettres et des dessins originaux de Georgio à ses parents, Serafina et Julius, qui ont réussi à s’échapper du camp de la mort. Maman a été soignée au sanatorium d’Hauteville, non loin d’Izieu, pour une tuberculose, et comme les nazis avaient peur des maladies infectieuses, ils ne sont jamais venus la chercher. Le père de Georgi, dentiste de profession, vivait dans un groupe d’étrangers où il travaillait dans des fermes.
Stéphanie Boissard explique l’importance du don de Klarsfeld à la Maison d’Izieu
Georgy, le petit reporter d’Izieu
Peu de temps après sa naissance, Georgy Halpern, né à Vienne, en Autriche, a fui avec ses parents la persécution nazie qui a commencé avec l’arrivée au pouvoir d’Hitler. A son arrivée en France, la famille doit échapper à la politique antisémite de Vichy. Après de nombreuses errances, dans différents lieux, les parents de Georgio le confient à la Maison d’Izieu en mai 43. Il a la chance de pouvoir leur écrire, en français, une langue qu’il apprend en classe et qu’il apprend rapidement. le progrès. Ses parents lui répondent, un lien que les autres enfants n’avaient pas, ne sachant parfois même pas où se trouve leur famille. Dans ces lettres, il se transforme en un vrai petit journaliste. « Il détaille la vie dans la colonie, ce qu’il mange, ce qu’il joue, les bêtises qu’il fait, dans un style vif et vivant », raconte Stéphanie Boissard, historienne et commissaire d’exposition.
Des parents inconsolables
Après presque un an de répit à Izieu, où Georgij et 43 autres enfants ont retrouvé leur insouciance, Barbie va l’arrêter avec ses camarades le 6 avril 44 et le tuer à Auschwitz. Ses parents, Séraphine et Julius, qui ont survécu à la Shoah, n’accepteront jamais sa mort. « Ils chercheront leur enfant jusqu’à leur dernier souffle », explique Stéphanie Boissard. « Ils n’ont jamais pu faire leur deuil, ils espéraient toujours le retour de leur enfant, ils n’ont pas accepté qu’il ait été gazé à son arrivée à Auschwitz. »
Un « cambriolage » pour la bonne cause
Les circonstances dans lesquelles Serge Klarsfeld a pu récupérer les documents de la courte vie de Georgi sont assez incroyables. Un jour, il rendit visite aux parents de Georgi qui lui montrèrent leur boîte de souvenirs. A leur mort, la boîte a été confiée au dernier membre vivant de la famille, un oncle qui vit à Londres. Informés du décès de ce dernier, Serge et Beate Klarsfeld se précipitent à l’appartement de Londres. Ils ont réussi à récupérer une précieuse boîte qui aurait sans doute fini à la poubelle. Serge Klarsfeld évoque, en souriant, un vrai « cambriolage », mais c’était pour la bonne cause !
Georgy est un peu comme mon jumeau – Serge Klarsfeld
Serge Klarsfeld est très attaché à Georgi, qu’il appelle son jumeau. Parce qu’il a aussi été caché pendant la guerre. Il est né la même année que George, en 1935, et les deux enfants se sont rencontrés dans l’une des maisons de l’organisation juive, OSE, une boutique humanitaire pour enfants, Château de Masgelier, à Dig. Serge Klarsfeld était trop jeune pour se souvenir de Georgi, ils avaient 6 ans, mais leurs histoires se font écho. « D’ailleurs », souligne Stéphanie Boissard, historienne d’Izieu, « Serge est vivant et Georgie a été tuée à Auschwitz. C’est pourquoi Maître Klarsfeld a la volonté de transmettre l’histoire de Georgie et de la faire connaître au plus grand nombre. »
Une stèle pour Georgy, en Autriche
En l’absence des Klarsfeld hier, c’est pourtant un élu de la mairie de Vienne, en Autriche, qui a dévoilé Izieu pour la première fois. Chargé de l’éducation et de la lutte contre l’antisémitisme dans son pays, il s’est dit ému. La ville de Vienne érige une stèle devant la maison où Georgije vécut les premiers mois de sa vie avant de fuir le nazisme, se réfugiant en France, fin 1935.
L’histoire de Georgy, racontée dans une video, par des collégiens d’Athis-Mons
Clément Huguet, professeur d’histoire-géographie raconte comment il a travaillé avec ses élèves de 4e pour raconter l’histoire de George
Autres invités de marque, Clément Huguet, professeur d’histoire-géographie chez le confrère Michel-Richard Delalande à Athis-mons, en région parisienne, et le vidéaste Michael Aymard. Avec 14 élèves volontaires de 4e, ils ont enregistré un film de 8 minutes qui raconte l’histoire de Georgio, mais aussi de trois enfants de réfugiés syriens en France, sous forme de chansons et de dessins. Une vidéo très émouvante qui a remporté le prix de la maison Izieu cette année, catégorie Faculté.
Michael Aymard, vidéaste, a réalisé la vidéo lauréate du prix Maison d’Izieu
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A travers ses lettres et ses dessins, Georgije est en quelque sorte revenu à Izie. La salle des archives de la Maison s’est donc enrichie d’une nouvelle collection, celle que les Klarsfeld lui ont confiée avec pour mission de conserver et d’exposer ces précieux documents à témoigner au grand public, afin qu’ils ne soient jamais oubliés.