AFP, publié le lundi 17 octobre 2022 à 18h44
En passe d’être racheté par Kanye West, le réseau social Parler jouit d’une certaine popularité auprès de l’extrême droite américaine et des proches de l’ancien président Donald Trump.
Retirée pendant plusieurs mois des principales boutiques d’applications mobiles début 2021 en raison d’une modération insuffisante des contenus, la plateforme a fini par être à nouveau autorisée. Mais il est loin de rivaliser avec des géants comme Facebook ou Twitter.
Le rappeur de 45 ans, qui s’appelle Ye, a justifié sa proposition de rachat en disant qu’il voulait défendre les opinions conservatrices et « le droit de s’exprimer librement ».
Parler se présente comme une alternative aux réseaux sociaux traditionnels, s’imposant comme un défenseur de la liberté d’expression face aux groupes accusés de censure et de parti pris anti-conservateur par la droite américaine.
Le réseau a été lancé à l’été 2018 par John Matze, un ingénieur en informatique, et Rebekah Mercer, un important donateur du Parti républicain.
Relativement confidentielle jusqu’en 2021, elle a vu sa popularité monter avec l’expulsion de Donald Trump de Twitter, alors que l’ancien président américain avait encouragé ses followers avant l’invasion du Capitole le 6 janvier 2021.
Le projet d’acquisition de Kanye West intervient alors que le rappeur fait face à des accusations de racisme et d’antisémitisme, qui lui ont notamment valu l’interdiction de ses comptes Twitter et Instagram.
« En acquérant Parler, Kanye peut s’assurer qu’il peut dire ce qu’il veut sur la plateforme », explique Joshua Tucker, codirecteur du Center for Social Media and Politics (CSMaP) de l’Université de New York, et Megan Brown, ingénieur CSMaP. .
« Il se peut aussi que posséder un réseau social devienne désormais un symbole de statut pour les ultra-riches au franc-parler, en particulier ceux qui ont lutté avec les plateformes existantes », ajoutent-ils.
Donald Trump a lancé sa propre plateforme en début d’année, tandis qu’Elon Musk, le patron capricieux de Tesla et SpaceX, se retrouve mêlé à une saga à rebondissements autour de son rachat de Twitter.
Selon le cabinet spécialisé data.ai, Parler a été téléchargé 8,5 millions de fois depuis son lancement, dont 6,2 millions de fois aux États-Unis.
En septembre, l’application n’ajoutait que 58 000 téléchargements dans le monde sur iOS et Google Play, loin des 72 millions de téléchargements enregistrés par Facebook sur la même période.
Interrogé par l’AFP sur son nombre d’utilisateurs et sa situation financière, Parler n’a pas répondu.
Donald Trump n’a pas de compte officiel sur la plateforme.
Kanye West, qui a ouvert son compte Parler la semaine dernière, est suivi par 1 800 abonnés. Il compte plus de 31 millions sur Twitter et 18,2 millions sur Instagram.
Déplorant la multiplication des menaces de violences et d’activités illégales sur le réseau après l’assaut du Capitole en janvier 2021, Apple et Google l’avaient retiré de leurs plateformes de téléchargement.
Amazon Web Services (AWS) avait également décidé de ne plus l’héberger sur ses serveurs, bannissant de fait la plateforme.
Parler est de retour sur l’App Store depuis avril 2021 et sur le Google Play Store depuis septembre 2021.
« Il y a probablement eu un changement dans les politiques de Parler plutôt que dans celles de Google ou d’Apple », ont déclaré Joshua Tucker et Megan Brown.
Outre Parler, ces dernières années une galaxie de réseaux sociaux destinés à un public ultra-conservateur a essaimé aux États-Unis, parmi lesquels Gettr, Gab et Rumble se distinguent.
En février, la plateforme Truth Social de Donald Trump est entrée en scène, un post entaché de nombreuses erreurs techniques.
Après avoir été retirée du Google Play Store cet été en raison d’une politique de modération jugée insuffisante, l’application est à nouveau approuvée depuis la semaine dernière.
L’audience de ces différents réseaux reste limitée pour le moment.
Selon une étude récente du Pew Research Center, seuls 6% des Américains obtiennent régulièrement leurs actualités via l’une de ces applications dites « alternatives ».