Sous TikTok, plus de chiffres : En Chine, le secteur Tech est sous contrôle

En l’espace de quelques mois en 2021, le gouvernement chinois a pris une cinquantaine d’actions brutales contre les grandes entreprises technologiques et leurs dirigeants : retards d’introduction en bourse géants, personnages historiques écartés, amendes massives et obstacles réglementaires.

Les conséquences ont détruit BATX (Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi). En bourse, le « Golden Dragon » a chuté de 45% en dix-huit mois et Alibaba, l’Amazon chinois, a perdu les trois quarts de sa valeur. Quant aux investisseurs étrangers, ils ont reculé. Qu’est-ce qui a poussé Xi Jinping à se lancer dans un tel braquage financier ? Affaiblit-elle la puissance technologique de la Chine ou, au contraire, cette prise de contrôle relève-t-elle d’une stratégie de long terme ?

Pour Asma Mhalla, professeur à l’Ecole polytechnique et à Sciences Po où elle enseigne la politique numérique, « cette prise de contrôle s’inscrit dans une volonté absolue de contrôle des moyens d’information, liée à un techno nationalisme fondé sur la souveraineté, l’hégémonie et le protectionnisme ».

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Un coup de massue aux effets incertains

Le Parti communiste chinois (PCC) veut restaurer cette subordination, sous couvert de protéger les consommateurs de la frénésie commerciale des différents services en ligne. « Il faut comprendre que pour le PCC, le maintien de la cohésion de l’État ne tolère pas la moindre fissure dans l’édifice, note un universitaire américain fréquemment invité en Chine. Pour Xi Jinping, l’horreur absolue était le destin de Gorbatchev : le malheur d’une ouverture contrôlée qui conduirait à la désintégration de l’empire. Alors quand un Jack Ma [le créateur d’Alibaba] ose critiquer l’obsolescence du système bancaire chinois, même s’il a fondamentalement raison, il est ostracisé. De même, alors que WeChat est devenu un outil universel pour les 1,2 milliard d’habitants de la Chine, le gouvernement l’a vu comme une conversation en fermentation qui pourrait contenir les germes de la protestation.

« Xi veut aussi s’attaquer à la surcommercialisation d’applications comme TikTok, note Sandrine Zerbib, dont le livre Dragon Tactics (Dunod), décrit en détail le modus operandi de la Chine. Le PCC veut aussi lutter contre les dérives économiques comme le surendettement des jeunes. facilités par les services financiers. Il faut redonner de la cohérence à tout cela et surtout réaligner les meilleures capacités technologiques du pays avec les intérêts stratégiques nationaux ».

Avec l’aide d’un club de régulation dont les effets sont encore incertains, PCC entend réaffecter les ressources de recherche et développement du secteur privé vers des disciplines essentielles pour l’avenir du pays : intelligence artificielle, physique quantique, espace extra-atmosphérique et robotique. En gros, le PCC demande de faire moins TikTok (dont le moteur d’intelligence artificielle est l’un des plus avancés au monde) et une technologie plus profonde, cette technologie disruptive à long terme. En Chine, ils ont en commun de contribuer au développement des capacités militaires du pays et d’augmenter significativement la productivité dans un pays où la population active diminue.

Retrouvez tous les épisodes de notre série ici :

ÉPISODE 1 – Chine : dangereuse obsession de la politique « zéro Covid »

ÉPISODE 2 – Chine : économie ravagée par la dette, les paris échouent Xi Jinping

Opinions

Chronique de Christophe Donner

Chronique d’Aurélien Saussay

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